Adèle

— Une bonne de maison bourgeoise. Traits accentués de Bretonne, cheveux couleur de chanvre. A peine débarquée de son pays, elle est entrée chez les Josserand, des maîtres qui abusent de son ignorance et de sa saleté pour la mal nourrir [32] Adèle est le souffre-douleur des autres bonnes de la maison, la bête sale et gauche sur laquelle tout le monde tape. Ce sont des injures continuelles, à travers. l’étroite cour de service, boyau noir dont la puanteur d’évier mal tenu est comme l’exhalaison même des ordures cachées des familles [136]. Trublot, toujours empressé auprès des cuisinières et des femmes de chambre, devient l’amant de la pouilleuse Adèle qui, un peu plus tard, couchera aussi avec Duveyrier, n’osant faire une impolitesse au propriétaire. D’ailleurs, la fréquentation des hommes cause si peu de plaisir à cette fille, qu’elle reste sale exprès, afin de ne pas leur donner des idées [340], Peu à peu, les autres domestiques l’ont dégourdie; elle vole des pruneaux et répond insolemment aux observations de madame Josserand, qui n’ose renvoyer cette bonne, si dure au travail. Devenue enceinte, Adèle, prise de terreur, a dissimulé sa grossesse avec des ruses de sauvage; elle accouche clandestinement dans d’affreuses souffrances [472] et, ne voulant pas tuer son enfant, va le déposer de bon matin dans le passage Choiseul, sans être aperçue. (Pot-Bouille.)