Lazare Chanteau

— Né à Caen. Fils des Chanteau. Filleul du banquier Thibaudier, dont il épouse la fille. Père du petit Paul. Avait quatorze ans lorsque ses parents ont quitté Caen pour se retirer à Bonneville. Est resté au lycée, qu’il quitte à dix-huit ans, avec son baccalauréat. Grand garçon, à .front large, aux yeux très clairs, avec un fin duvet de barbe châtaine, qui encadre sa face longue. Lors de l’arrivée de sa cousine Pauline Quenu à Bonneville, il bat les falaises depuis huit mois, ne se décidant pas à choisir une occupation [7].

C’est un névrosé plein de J’ennui sceptique de toute sa génération [345], incapable de s’intéresser à la vie, se, laissant, au gré des suggestions extérieures, emballer tour à tour sur la musique, la médecine, la chimie, l’industrie et la littérature.

Plein d’enthousiasmes soudains, il se dégoûte devant les réalisations; il voit trop grand mais il a, en même temps, le mépris de l’argent [23]; hanté d’une peur maladive de la mort, il est pourtant brave devant les agonies et se jette résolument dans un incendie pour sauver l’enfant d’une paysanne [360] ; il a soigné avec le plus complet dévouement Pauline en danger de mort [154] et il est incapable de rendre le moindre service a sa mère moribonde, qu’il aime tendrement [214]. Lazare est un malade en qui se heurtent toutes les contradictions. Esprit fort, dégagé de toute croyance, il subit des superstitions ridicules [266]; doué d’une vive intelligence, il est inapte à toute décision, sa volonté est toujours vacillante. Après avoir accepté le mariage avec sa cousine, qu’il aime et qu’il a failli mettre à mal [112], il se laisse circonvenir par Louise Thibaudier, accepte passivement tous les sacrifices de Pauline, n’ayant que de courtes révoltes, puis, finalement, épouse Louise, qu’il s’est mis à désirer follement. Dix-huit mois après, encore une fois désillusionné, il est repris d’une passion charnelle pour sa cousine [361]. Au fond, derrière ses emballements de jeunesse et la névrose dont il souffre, on retrouve, très vif, le profond égoïsme des parents.

Lazare a gaspillé l’argent de Pauline dans des tentatives industrielles, dans la construction d’une estacade qui doit sauver Bonneville des fureurs de la mer ; marié, il abandonne vite un emploi que son beau-père lui avait trouvé dans une compagnie d’assurances, et c’est alors la dot de Louise qu’il commence à éparpiller en des entreprises téméraires. Tout ayant échoué, il revient à Bonneville, plus impuissant que jamais, énervé par les récriminations de sa femme, en proie à une effroyable peur de mourir, qui lui enlève un peu plus chaque jour le goût et la force de vivre [343]. (La Joie de vivre.)

Devenu veuf, il laisse son fils à Pauline Quenu et part en Amérique pour faire fortune [129]. (Le Docteur Pascal.)