Jacques-Louis Lantier

— Fils de Claude Lantier et de Christine Hallegrain. Filleul de Pierre Sandoz [212]. A été conçu le jour tragique où Christine s’est livrée à Claude, dans les larmes, sous le crépuscule navré qui noyait l’atelier de l’artiste; ce sera l’enfant de la souffrance et de la pitié [196]. Il naît à Bennecourt, il s’élève un peu à l’aventure, dans l’indifférence de ses parents, la mère restée amante, le père tout à sa peinture; on le met nu comme un petit saint Jean devant le chevalet paternel, et Claude s’exaspère coutre ce polisson qui ne veut pas garder l’immobilité de la pose, [199]. Il vit à la campagne jusqu’à deux ans et demi et s’y __trouve admirablement; à Paris, il est sacrifié, n’ayant à table que les seconds morceaux, la meilleure place près du poile n’étant pas pour sa petite chaise, sans cesse relégué, supprimé, invité à se taire parce qu’il fatigué son père, à ne pas remuer parce que soit père travaille [276]. Il ne pousse plus que chétif, sérieux comme un petit homme ; à cinq ans, sa tête grossit démesurément et, à mesure que le crâne augmente, l’intelligence diminue. Très doux, craintif, l’enfant s’absorbe pendant des heures, sans savoir répondre, l’esprit en fuite [277]. Sa tête seule continue de grossir, on ne peut l’envoyer pins de huit jours de suite à l’école, d’où il revient hébété, malade d’avoir voulu apprendre [316]. Enfin, débilité de mauvaise nourriture, le pauvre être meurt et sa mère, s’éveillant d’un lourd sommeil qui l’a engourdie près de lui, le retrouve sur le dos, déjà d’un froid de place avec sa tête trop grosse d’enfant du génie, exagérée jusqu’à l’enflure des crétins [356].

(1)  Jacques-Louis Lantier, né en 1860, hydrocéphale, meurt en 1869. [Élection du père. Ressemblance physique du père]. (Arbre généalogique des Rougon-Macquart.)