Mouquette

Une hercheuse de dix-huit ans, bonne fille dont la gorge et le derrière énormes crèvent la veste et la culotte. Elle habite avec son père et son frère, dans les ruines de Réquillart. An milieu des blés en été, contre un mur en hiver, elle se donne du plaisir avec son amoureux de la semaine; toute la mine y passe, une vraie tournée de camarades, sans autre conséquence. On ne la fâche qu’en lui attribuant des amours extérieures; elle se respecte trop pour aller avec un autre qu’un charbonnier [29]. Le lundi, lorsqu’elle est lasse des farces du dimanche, elle se donne un violent coup de poing sur le nez, quitte sa taille sous prétexte d’aller chercher de l’eau, et vient se réfugier à l’écurie, dans la litière chaude [62].

Pour la Mouquette, la suprême expression du dédain consiste à montrer son derrière; pendant la marche des grévistes au travers des fosses, elle le présente, énorme et nu, aux bourgeois de Montsou et quand l’émeute gronde autour du Voreux, quand les soldats chargent leurs fusils, elle leur crache d’abord tous ses gros mots, puis, n’ayant plus que cette nouvelle offense à bombarder au nez de la troupe, elle lui montre son cul [483]. Peu sentimentale de nature, la Mouquette s’est éprise pourtant d’Étienne Lantier [2861; c’est une très courte liaison qu’Étienne rompt bientôt, car il est hanté par son amour pour Catherine Maheu. Celle-ci est sauvée le jour de l’émeute par la Mouquette qui, d’un mouvement instinctif, s’est jetée devant elle en lui criant de prendre garde. La bonne fille reçoit deux balles dans le ventre, elle s’étale sur les reins et, mourante, elle hoquète sans cesser de sourire à Catherine et à mienne, comme si elle était heureuse de les voir ensemble, maintenant qu’elle s’en va [488]. (Germinal.)