François Mouret

Fils aîné d’Ursule Macquart, et du chapelier Mouret. Frère d’Hélène et de Silvère. Père d’Octave, Serge et Désirée. Né à Marseille en 1817. Grande ressemblance physique avec sa mère et avec l’aïeule Adélaïde Fouque ; tient de son père un cerveau étroit et juste, aimant d’instinct la vie réglée. C’est un garçon paisible et méticuleux, un peu lourd de sang. Il a reçu une bonne éducation commerciale et, après la mort de son père, en 1840, a quitté Marseille et est entré, à titre de commis, citez son oncle Pierre Rougon, à Plassans. Trois mois après, François épouse sa cousine, Marthe Rougon, avec qui il a une grande ressemblance physique et une grande dissemblance morale. De 1840 à 18144, les deux époux ont trois enfants; quand Pierre Rougon se retire, en. 1845, ils refusent de prendre le fonds et vont s’établir à Marseille, avec quelques économies [161]. (La Fortune des Rougon.)

En quinze ans, François a gagné une fortune dans le commerce des vins, des huiles et des amandes [33]. Il se retire avec sa femme et ses enfants à Plassans, où il a acheté rue Balande une maison avec grand jardin, attenant en haut à la sous-préfecture, en bas à la propriété de M. Rastoil. A quarante-cinq ans, Mouret, sous soit épaisseur de négociant retiré, a conservé un esprit lin et frondeur, il tyrannise son entourage par des goûts d’ordre minutieux ; ses instincts d’hotu nie rangé le portent à l’avarice.

Fort heureux, maître chez lui, concluant encore des affaires pour le plaisir [28], il s’avise un jour que deux chambres du second étage lui sont inutiles et il les loue à un prêtre, l’abbé Faujas qu bientôt va s’emparer de la maison tout entière, faisant d’elle, entre les deux sociétés qu’elle sépare, le quartier général de ses manœuvres. Dès lors, Mouret a perdu sa belle tranquillité égoïste. Habilement circonvenu par Faujas, il le laisse pénétrer dans son foyer, s’habitue aux parties de piquet avec la mère de l’abbé [92], voit peu à peu Marthe lui échapper sans avoir l’énergie de la reprendre. Il se console en la criblant de plaisanteries, puis s’irrite contre la prêtraille [119] ; mais au fond, il est faible comme un enfant et en arrive à tout supporter [128], s’attachant à ne pas laisser deviner sa détresse, cachant soigneusement ses émotions [146], refusant de livrer les secrets de son ménage perdu [165].

Tout craque autour de lui, Marthe vit enfoncée dans son rêve, l’aîné Octave gâte sa jeunesse à Marseille [181], Serge s’est réfugié au séminaire, Désirée est presque idiote, la vieille servante Rose est devenue grondante et hostile, les Faujas et les Trouche enfin se partagent la maison. Cette lente expropriation écrase Mouret. Il se concentre dans des silences mornes [225], vit oublié à sa propre table [242], s’enferme pendant des heures au premier étage, où il reste les bras ballants, la tète blanche et fixe, le regard perdu [255].

Mais cet homme inoffensif tient encore trop de place, sa seule présence excède Marthe, il gène les Trouche qui rêvent d’être les seuls maîtres, Félicité Rougon voit dans cet opposant aimé des petits bourgeois et des faubourgs un danger pour les élections imminentes. Et tous ces appétits qui soufflent détraquent l’esprit affaibli de Mouret, une légende habilement répandue montre en lui un monomane dangereux ; on l’enferme enfin aux Tulettes, à deux pas de l’aïeule Adélaïde Fouque, et bientôt il devient complètement fou [362].

Lâché un soir par le gardien Alexandre, complice d’Antoine Macquart, il court à Plassans, rentre dans son jardin dévasté, dans sa maison an pillage, découvre les Trouche vautrés sur son lit et appelle en vain Marthe et les enfants disparus. Alors, plein (l’une fureur homicide, il décide de tout détruire; avec une effroyable lucidité, il dresse silencieusement des bûchers et il allume en pleine nuit un terrible incendie où tout flambe, la maison s’abattant sur le fou, sur les Trouche, sur les Faujas, au milieu d’une poussière d’étincelles [385]. (La Conquête de Plassans.)

(1) François Mouret, né en 1817; épouse, en 1810, sa cousine Marthe Rougon, dont il a trois enfants; meurt fou, en 1864, dans un incendie allumé par lui. [Élection du père. Ressemblance physique de la mère. François et Marthe, les deux époux, se ressemblant].Marchand de vin en gros, puis rentier. (Arbre généalogique des Rougon-Macquart.)