— Troisième enfant d’Ursule Macquart et du chapelier Mouret. Frère de Francois et d’Hélène. Né à Marseille, en 1834, orphelin à six ans, il vient à Plassans avec François. Accueilli de mauvaise grâce par l’oncle Pierre Rougon, Silvère grandit dans les larmes, comme un malheureux abandonné, jusqu’au jour où sa grand’mère Adélaïde Fouque, ayant pitié de lui, l’emmène en son louis de l’impasse Saint-Mittre. C’est alors une heureuse vie pour l’enfant, en qui la vieille femme, pleine de tendresse contenue, trouve une lointaine ressemblance avec le grand-père Macquart. Silvère la cajole, il invente pour elle le nom caressant de tante Dide; d’abord effrayé des crises nerveuses qui la secouent périodiquement, il s’habitue à ces fureurs incompréhensibles, il est pris de pitié devant la douloureuse aïeule victime de maux inconnus, il la soigne doucement et l’aime d’une affection silencieuse et attendrie [165].
A douze ans, avant seulement quelques notions d’orthographe et d’arithmétique, il entre comme apprenti chez Vian, un charron voisin, et devient en peu de temps un excellent ouvrier. Plein du désir de s’instruire, il fréquente l’école de dessin, puis il s’enfonce dans l’étude sans guide, acquérant des bribes de science, s’appliquant à lire tous les volumes dépareillés, science, histoire, philosophie, qui lui tombent sous la main, se faisant une idée sainte de tant de grandes choses qu’il entrevoit. Cette vie sérieuse lui donne une âme exaltée, où s’amassent tous les enthousiasmes [167].
Les idées républicaines le passionnent ; prédisposé à l’utopie par certaines influences héréditaires [226], il veut le bonheur universel, un gouvernement idéal d’entière justice et d’entière liberté. Ces belles aspirations, que l’oncle Antoine Macquart essaye vainement d’exploiter au profit d’une vengeance personnelle [179], ces rêveries sans fin surexcitent le généreux enfant dont le docteur Pascal va dire un peu plu, tard : La famille est complète, elle aura un héros [257]; mais ce n’est pas seulement la déesse Liberté qui exalte Silvère, il éprouve une tendresse infinie pour Miette, la fille du forçat Chantegreil, innocente enfant persécutée de tous et dont il a voulu être l’ami, la sauvant du désespoir, lui apportant la rédemption. Leurs pures amours au fond de Faire Saint-Mittre durent deux belles années pleines de douceurs infinies et s’achèvent dans un ardent baiser [206], que le coup d’État noie dans le sang. Deux jours après la mort de Miette, tuée à Saint-Roure par les troupes de l’ordre [263], Silvère qui avait accidentellement éborgné le gendarme Rengade [189] est assassiné par celui-ci, dans le coin même ‘e l’aire Saint-Mittre où avait fleuri la fraîche idylle [382]. (La Fortune des Rougon.)
(1) Silvère Mouret, né en 1834; meurt, en 1851, la tête cassée d’un coup de pistolet, par un gendarme. [Élection de la mère. Innéité de la ressemblance physique]. (Arbre généalogique des Rougon-Macquart. )