Guillaume Sambuc

— Terrible chenapan, digne fils d’une famille de bûcherons qui a mal tourné, le père ivrogne, trouvé un soir la gorge coupée, au coin d’un bois, la mère et la fille mendiantes et voleuses, tombées à quelque maison de tolérance; lui braconne et fait la contrebande ; son frère Prosper est le seul petit de cette portée de loups qui ait grandi honnête. Pendant la guerre de 1870, Guillaume appartient à une de ces compagnies franches qui devaient faire la guerre d’embuscade, tuer les sentinelles de l’ennemi, tenir les bois d’où pas un Prussien ne sortirait, et qui devinrent vite la terreur des paysans, qu’elles défendirent mal et dont elles ravagèrent les champs. Il est le sergent d’un groupe de francs-tireurs dissimulés dans les bois de Dieulet. Grand et maigre, avec une épaisse barbe en broussaille, il porte une blouse grise, serrée à la taille par une ceinture rouge [l39].

C’est lui qui, dans la soirée du 29 août, fournit inutilement au général Bourgain-Desfeuilles de précieux renseignements sur la marche de l’ennemi à travers les bois, mouvement qui va entraîner la surprise de Beaumont. Plus tard, pendant l’occupation, Guillaume et ses hommes rôdent la nuit par les routes, tuent et dévalisent les Prussiens qu’ils peuvent surprendre, se rabattent sur les fermes et les rançonnent quand le gibier ennemi vient à manquer. Parcourant le pays en tous sens, ils sont devenus les pourvoyeurs du père Fouchard, dont ils reçoivent des fournées de pain, en échange des bêtes crevées qu’ils lui procurent pour l’approvisionnement des troupes allemande [521]. Comme les francs-tireurs ont une haine particulière contre Goliath Steinberg, qui leur fait une chasse dangereuse, Guillaume, sur l’indication de Silvine Morange, organise un guet-apens contre l’espion, s’empare de lui avec l’aide de Cabasse et de Ducat, l’étend ligotté sur une table et lui ouvre la gorge en faisant lentement couler le sang dans un haquet [538]. Le corps jeté dans la Meuse est retrouvé par les Prussiens, et, à partir de ce moment, les francs-tireurs, traqués comme des fauves, ne reparaissent plus [565]. (La Débâcle.)